Chapitre 4
Sous une apparence familière, Blancpain présente un tourbillon entièrement inédit.
Intéressons-nous aux significations symboliques du chiffre douze. Oubliez les douze mois de l’année, les douze animaux du calendrier chinois ou les douze signes du zodiaque. Les douze travaux d’Hercule. Les douze divinités principales de la mythologie grecque. Les douze salles imposantes du paradis scandinave, sans doute moins connues. Les douze lions qui ornaient, selon la légende, les marches du trône de Salomon. Les douze planètes du système solaire (même si la question se présente en ce cas sous un jour plus complexe, car il conviendrait de retrancher Pluton, qui a perdu son statut de planète, et d’ajouter des corps célestes dont les astronomes pensent qu’ils ont été détruits). Nous parvenons enfin à toucher au but avec la réserve de marche de douze jours de la Villeret Tourbillon 12 Jours de Blancpain.
Avant d’examiner en détail la Villeret Tourbillon 12 Jours et son nouveau calibre 242, il n’est sans doute pas inutile de marquer une pause afi n de considérer brièvement les principes fondamentaux du tourbillon. Inventé et breveté par Abraham-Louis Breguet en 1801, ce mécanisme est destiné à améliorer la précision. Toutes les montres sont sujettes à de petites variations de marche provoquées par la gravité lorsqu’elles sont portées dans une position verticale. Dans certaines d’entre elles, la force de l’attraction terrestre provoque une faible avance alors que, dans d’autres, elle est à l’origine d’un léger retard. L’objectif essentiel du tourbillon réside dans l’annulation de ces erreurs par la disposition de l’organe réglant de la montre dans une rotation constante de 360 degrés qui fait passer le balancier et l’échappement à travers toutes les positions d’avance et de retard, les premières annulant les secondes. La construction classique, décrite dans le brevet original et mise en pratique depuis lors, se fonde sur une cage qui supporte le balancier et l’échappement tout en tournant autour d’une roue fixe. Comme sur tous les tourbillons, et à l’inverse du carrousel de Blancpain qui compense les écarts de marche par la rotation des composants de l’organe réglant, la rotation de la cage est directement reliée à l’échappement. L’énergie délivrée par le rouage pour assurer la révolution de la cage alimente également l’ échappement et, si cette rotation autour de la roue fixe est interrompue pour un motif quelconque, la montre cessera de fonctionner.
Selon toute vraisemblance, de fins connaisseurs en garde-temps de Blancpain décréteront, après avoir jeté un bref regard sur la nouvelle Villeret Tourbillon 12 Jours qui leur aura permis de reconnaître la forme familière de la cage de tourbillon, que ce mouvement figure depuis de nombreuses années au catalogue de la marque. Tel est précisément le danger des rapides coups d’œil. Aucune conclusion ne serait plus erronée car, même si la forme de la cage et la position décentrée du balancier peuvent être considérées comme un hommage rendu à la longue histoire des tourbillons de Blancpain, le calibre est entièrement nouveau. Dès le début du projet de développement, Marc A. Hayek a insisté sur le respect de la tradition. L’architecture de la cage de tourbillon, la position décentrée du balancier et l’absence de pont supérieur (une caractéristique qui lui vaut la désignation de « tourbillon volant », une notion définie de manière détaillée ci-après) ont marqué d’un jalon essentiel l’histoire de l’horlogerie lorsque Blancpain a dévoilé ce calibre en 1989. En eff et, au moment de sa présentation, il s’agissait du premier tourbillon volant une minute au monde dans une montre-bracelet et du premier tourbillon à offrir une réserve de marche de 8 jours. Ironiquement, la notoriété de ce tourbillon est telle que l’équipe de Blancpain a constaté que les contrefacteurs qui tentent d’imiter un tourbillon copient fréquemment les contours de ce design classique. Sans aucun doute, Blancpain aurait pu puiser dans ce patrimoine génétique mais, comme nous allons le voir, le calibre 242 est né d’une page blanche.
Avant de passer en revue l’ensemble des singularités et des constructions du Tourbillon 12 Jours, penchons-nous sur un aspect qui échappe à l’œil, ses performances. À cet égard, son nom est éloquent : ce tourbillon offre une réserve de marche de 12 jours entiers. En réalité, son autonomie atteint environ 14 jours. Toutefois, avec une saine prudence, Blancpain a retenu une valeur de 12 jours. Aucun autre tourbillon à remontage automatique au monde n’est capable d’égaler cet exploit, qui comprend une caractéristique supplémentaire : il est réalisé avec un seul barillet qui, naturellement, arbore des dimensions imposantes, tant par son diamètre que par son épaisseur, et occupe presque toute la hauteur du mouvement. Son rochet est visible à travers le fond de la montre à 6 heures et il se reconnaît à la présence, sur sa face supérieure, de la roue « à jantes », emblématique de Blancpain.
Commençons l’examen du calibre 242 par son balancier. Il est confectionné en glucydur traité or noir et comporte des bras en forme de demi-spirale. Sa serge est incurvée à chacun des quatre emplacements des vis de régulation en or. Grâce aux creusures pratiquées, les têtes des vis ne dépassent pas la circonférence du balancier. Cette particularité permet d’insérer un balancier aux dimensions plus généreuses à l’intérieur des limites de la cage. Avec son diamètre de 7,95 millimètres, il est le plus grand de tous les balanciers des montres à tourbillon de Blancpain. Comme les vis de régulation sont insérées dans des creux, les alternances en avant et en arrière du balancier rencontrent une résistance d’air moindre, en particulier quand il passe à proximité des piliers de la cage. Le spiral, quant à lui, est un produit de haute technologie réalisé en silicium.
Si elle présente une forme identique à celle de ses devancières, la cage de tourbillon est également la plus grande jamais réalisée par Blancpain. Le positionnement du balancier à l’extérieur du centre de rotation autorise une construction plus fine. Cette disposition off re aussi la possibilité de placer la fourchette et la roue d’ancre sur un même plan, de sorte que le « tictac » de la montre peut être aisément observé pendant que le tourbillon progresse dans sa rotation. En accord avec les traditions de Blancpain, le sommet de la cage, qui accueille l’échappement, possède une pointe qui sert d’aiguille des secondes.
Une inspection attentive de l’ouverture du tourbillon fait apparaître une différence radicale et quatre subtiles modifications par rapport aux réalisations antérieures de Blancpain. Sur les autres tourbillons, le pont de la cage s’étend à travers tout l’arrière du mouvement. Cet élément revêt une double importance. En effet, dans les constructions habituelles de tourbillon, la cage est fixée entre deux supports, le premier côté cadran et le second sur le fond du mouvement. Blancpain a réalisé une avancée majeure dans le champ de l’horlogerie en présentant le premier tourbillon volant une minute au monde. Le terme de « tourbillon volant » s’applique à un tourbillon dont le support supérieur, généralement constitué d’un pont, a été retiré afin de garantir au propriétaire de la montre une vision qui ne soit gâchée par aucun obstacle. Par voie de conséquence, la fixation du tourbillon n’est assurée que par un support inférieur. Sur le calibre 242, le pont traversant traditionnel à Blancpain a été remplacé par un pont incurvé disposé autour de la roue entraînant le pignon qui provoque la rotation de la cage et, naturellement, de l’échappement. Cette construction dépourvue de pont côté cadran correspond sans conteste à la définition d’un tourbillon volant. Comme la cage est plus grande, le pignon destiné à entraîner le tourbillon doit aussi gagner en importance. Il possède donc 14 ailes au lieu des sept présentes sur les précédents tourbillons de Blancpain.
Souvenez-vous que ce pignon commande simultanément la rotation de la cage et de l’échappement. Voilà qui nous conduit directement à examiner une autre diff érence subtile, la roue fixe. Le principe fondamental de tous les systèmes de tourbillon réside dans la rotation de la cage et des composants de l’organe réglant (le balancier et l’échappement) autour d’une roue fixe. Le rouage de la montre délivre l’énergie au pignon de la cage avec l’échappement qui tourne autour de la roue fixe. Alors que les autres tourbillons de Blancpain utilisent une roue fixe plutôt massive, le calibre 242 se singularise par une apparence aérienne et une roue ajourée à bras. La dernière distinction subtile observable à travers l’ouverture du tourbillon est, en réalité, un élément qui reste dissimulé au regard. Sur les autres calibres à tourbillon, le bord supérieur de la roue des heures apparaît de manière saillante sur le fond. Cette roue est désormais entièrement invisible, car elle est située sous le cadran. Un aspect est demeuré constant : le support du tourbillon volant est constitué d’un roulement à billes en céramique, comme sur tous les tourbillons de Blancpain. La dernière modification qui surgit lors d’une étude minutieuse du tourbillon requiert une certaine finesse d’observation. Plutôt que de se situer au-dessous du niveau de la platine supérieure du mouvement, le sommet de la cage de tourbillon adopte une position surélevée, à 0,6 millimètre au-dessus de la platine. Le calibre 242 partage cette particularité avec les carrousels de Blancpain qui élèvent aussi le sommet de la cage au-dessus de la platine supérieure. Ce choix s’explique, naturellement, par un accroissement de la visibilité.
Il est temps de retourner la montre. L’œil du connaisseur est immédiatement attiré par la décoration des ponts du mouvement, qui sont guillochés à la main dans un motif flinqué. Confectionné en platine ou en or rouge selon les versions, le rotor de remontage est également orné d’un motif gravé. Cependant, sa forme retient l’attention. Il a été ajouré pour offrir au regard la décoration des ponts du mouvement. Cette opération a exigé une incontestable inventivité. À l’évidence, le retrait de la matière qui occupait l’espace désormais ouvert à la vue réduit la masse du rotor et porte atteinte à l’efficacité du remontage. La ruse retenue pour pallier cet inconvénient a consisté à étendre la bordure du rotor au-delà de sa surface, à l’extérieur du périmètre du mouvement. De cette manière, la masse retirée pour créer l’ajourage est restituée au rotor qui assure un remontage optimal. Une seconde astuce se retrouve sur le système de remontage automatique. Les autres tourbillons automatiques de Blancpain montent le rotor sur un pont situé au-dessus des autres ponts du mouvement. Sur la Villeret Tourbillon 12 Jours, le mécanisme de remontage se situe au même niveau, une caractéristique qui permet de diminuer l’épaisseur de la montre et d’obtenir une surface plane pour la décoration guillochée eff ectuée à la main.
Sur une montre qui recèle une réserve de marche de 12 jours, il est très utile de disposer d’une indication de la réserve de marche. Cet affichage apparaît au dos de la montre sous la forme d’un disque gravé sur lequel l’énergie résiduelle est indiquée par une flèche sculptée dans un petit pont. Un bref instant de réflexion suffit à se rendre compte qu’il n’existe que deux situations au cours desquelles le propriétaire souhaite connaître la réserve de marche : le matin avant d’attacher sa montre au poignet pour s’assurer qu’elle est assez remontée avant de commencer la journée et le soir afin de vérifier qu’elle possède une quantité d’énergie suffisante pour fonctionner pendant la période où elle ne sera pas portée. Dans les deux cas, il est aisé de consulter l’indication située sur le fond de la montre. En effet, pourquoi encombrer le cadran par une information qui est uniquement importante au moment de mettre ou de retirer la montre ? En outre, le déplacement sur le fond de l’affichage de la réserve de marche confère une élégance particulière à la Villeret Tourbillon 12 Jours.
Comme il convient à un garde-temps d’un tel raffinement, le cadran est confectionné en émail grand feu. Ce modèle est disponible en deux exécutions au diamètre de 42 millimètres, l’une avec un boîtier en or rouge et l’autre avec un boîtier en platine. Cette dernière version sera exclusivement éditée dans une série limitée de 188 exemplaires.